Pauillac - Saint Louis du Rhône

3ème demie étape: Béziers à St Louis du Rhône

 

    Lundi 14 mai     Béziers - Mèze
 

                Et nous voilà au niveau de la mer, plus d'écluse. Je rebrancherais même Giorgio sur l'étang de Thau, ou nous trouverons un clapot de NE fort désagréable.

                Hormis le choc visuel de retrouver de l'espace, nous serons déçus.

                Cet étang est bâtard,  colonisé par les ostréiculteurs,  les voiliers ne sont pas les bienvenus. De plus, nous comptions aller à Sète ou nous gardons de bons souvenirs de l'époque Aveyronnaise (c'était quel millénaire déjà ???). Il y a des travaux dans le port, et il faut téléphoner pour prendre RDV pour l'ouverture des ponts. Comme il aurait fallu en faire autant pour ressortir… Je renonce.

                Nous passerons la nuit à Mèze, mais là aussi, on ne peut pas dire que les plaisanciers de passage soient les bienvenus. Pas de place sur les nombreuses pannes, obligé de mouiller à l'extrémité du quai, avec une margelle sous l'eau qui risque d'endommager sérieusement la coque, avec déferlantes levées par les "pêcheurs" givrés qui entrent à fond les gaz. Ils sont fous.

il s'appelle Ulysse !!! sans blague...

 

arrivée sur le petit pont de Capestang

hauteur sous barrot très limitée...

écluse ronde d'Agde

  Étang de Thau, le pilote en action... La belle lumière de l'étang de Thau à Mèze
     
 

Mardi 15 mai      Mèze – Aigues Mortes

         On navigue ce jour, sur le cordon du littoral. Voilà quelque chose de bien balisé: à tribord les usines à touriste, à bâbord  les usines à pétrole, à bord l'usine à gaz..

 

     

               Hyper marrant, la traversée de Frontignan, ou il faut attendre l'ouverture du pont mobile. Il y a trois passages par jour.  Comme nous sommes bien en avance pour le passage de 13 h, on se met à côté d'une péniche, dont la skipper nous donne un coup de main pour passer les amarres. Elle a 74 ans !!! et navigue avec son mari Anglais qui est, nous dit elle, beaucoup plus âgé… Pour se faire de l'argent, ils ont aménagé 3 chambres dans la péniche, qu'ils louent dans les villes sur le Rhône au moment des festivals…

                Elle nous trouve plutôt mal garés, trop près du pont, car ça s'agglutine des 2 côtés du pont qui est étroit, et on trouve de tout: péniches, voiliers démâtés,  bateaux de location et bien sûr "superbe motors sailers de 3m50 de haut, et d'au moins 350 CV, et d'une longueur en conséquence ", sans oublier quelques pêcheurs énervés.

                Elle nous recommande d'attendre, et de passer tranquilles les derniers, avec deux avantages dit elle: premièrement c'est plus sûr, deuxièmement ça vaut le spectacle 10 mn avant le départ de la régate, tout le monde cherche à virer en tête. Comme c'est valable des deux côtés du pont. Pour être bien sure qu'il nous arrive rien, elle nous tire le bateau façon batelière de la Volga, sur 20 mètres, bien en amont (d'un seul coup je ne sais plus ou est l'amont… ), juste à côté de sa péniche ou l'on aperçoit son mari d'Anglais entrain de déguster, pépère, un produit jaune qui ne doit pas être du thé !!!

                Elle avait raison, c'est un vrai délire. Au feu vert, ça part de partout, dans tous les sens. Ça me rappelle un peu la place de la concorde, vers 18h, une belle soirée de grève des transports en commun.

     
L'arrivée sur Aigues Mortes est spectaculaire

 

La nuit, sous les ponts, l'est beaucoup moins

 

     

                Complètement déçus par Aigues Mortes à cette saison. D'abord, pas de place pour mouiller, ensuite je merde largement l'accostage au seul emplacement libre: sous un pont routier, juste derrière le pont SNCF, à côté d'un bateau à poste, occupé par une nana hystérique qui gueule a longueur de temps après ses gamins… hallucinant.

     
 

Mercredi 16 mai       Aigues Mortes - GalLician

 

                Nous avions prévu de nous arrêter à Aigues Mortes, pour retrouver le cousin Hubert, qui se trouve chez le cousin Daniel, qui habite à Aimargues, juste à côté, et qui produit un excellent petit vin des coteaux du Gard.

                Tout faux, le cousin Daniel est à Tahiti pour ses affaires, le cousin Hubert qui garde les enfants de Daniel ne peut se libérer… et on aura pas de pinard…  Comme vers 11 h, la voisine hystérique monte en puissance… à larguer, direction la petite Camargue.

 

                Il y a un magasin super U sur le bord du canal… le rêve… Il y a aussi une petite dépression sur le golfe du Lion, qui nous génère un petit 30 à 35 nœuds traversier, qui rend impossible l'accostage… rage… d'autant plus que la réserve de vin est au plus bas, et que pour le GO je recommence à angoisser.

                Qu'à cela ne tienne, le guide nautique nous annonce à Gallician, une halte nautique, avec tout ce qui faut: mouillage sur ponton, commerce et GO en ville… extra.

                Extra, extra façon de parler. Le petit port est bourré, et les quelques places libres sont à prendre cul au quai, en pointe sur une pendille amarrée sur une bouée. Avec le vent traversier, j'imagine les joies du mouillage au cas je merderais quelque chose… Prudent, le breton décide d'aller mouiller un peu plus loin, ou les bords semblent francs, à côté de quelques bateaux qui ont manifestement optés pour la même prudence.

                Avec ce vent traversier, la technique est simple, mais faut pas rater, surtout avec un mat qui dépasse de partout:

  • Repérer le bon emplacement
  • Venir sur l'aire au vent du point visé
  • Laisser dériver vers le bord en contrôlant
  • Serrer les fesses
  • Accoster en douceur et chercher un point d'ancrage ???

                Bien sûr il n'y a rien pour amarrer. Solution: une ancre sur la berge, un bout sur le piquet du voisin, un bout sur une garde assurée par 2 tournevis enfoncés au marteau, et souhaiter que le vent tombe, sinon on ne peut pas repartir.

                Nous allons passer une soirée merveilleuse, Il y a en Camargue 2 sortes d'oiseaux.  Ceux qui chantent le jour et qui bousillent la sieste , et ceux qui chantent la nuit. J'aime bien la nature sauvage….

Et le vent est tombé.

     
 

Jeudi 17 mai      GalLician  - St Louis du Rhône

                Nous comptions nous arrêter à Arles.  Ce sera raté, Arles est mal foutu pour les bateaux. Le seul emplacement est réservé "aux bateaux à passagers !!!" . 

                           En Bretagne, dans le Golfe, nous appelions cela des promènes couillons…

                                                         Ici ça se nomme "bateaux à passagers ".

                  Donc, décision de faire route directe sur St Louis du Rhône. De tout façon, il n'y a pas d'autre alternatives. Ça va faire une bonne route. Mais elle est superbe.

            Pas de phrases… rien que des photos…

Petite Camargue, un copain... Petite Camargue Petite Camargue
Petite Camargue St Gille dernière écluse Première balise, il y a du courant...
Il faut d'abord remonter le petit Rhône dernier pont il lui faut de la vitesse pour manoeuvrer
Le grand Rhône rien que pour nous... Quoique... Et voilà, fin de l'étape on va remâter
     

Du Vendredi 18 au Dimanche 20 mai      St Louis au port

     Bien sur, le chantier ou nous devons sortir le bateau ne peut nous prendre que lundi prochain. Nous voilà bloqués à St Louis du Rhône, dans un port commercial et industriel sans beaucoup d'âme. C'est bâtard, entre le Rhône et le golfe de Fos, mi marin, mi fluvial.

Les péniches qui  éclusent au fond du bassin, avec le mistral traversier, doivent garder beaucoup de vitesse pour rester manœuvrant.  Si on y ajoute les pêcheurs, toujours à fond la caisse, dont on se demande si la détaxe du gazole est bien utile… Plus les pêcheurs plaisanciers toujours pressés d'être les premiers sur leur lieu de pêche "ultra secret…", et bien sur, les propriétaires de "superbes motors sailers de 3m50 de haut, et d'au moins 350 CV, et d'une longueur en conséquence". Ça fait beaucoup de bruit et de clapot pour un petit Fantasia démâté..

     Et, c'est pas tout. Samedi… Mistral… 35 nœuds… "Mistraou" disent les anciens (le maître). Y a rien à dire, rien à faire, se terrer à l'abri, et attendre que ça passe, et surtout que rien ne dépasse.

     Dimanche, éclosion et attaque massive de moustiques. C'est absolument invivable. Des milliers de moustiques qui attaquent en commandos serrés. C'est vrai que nous sommes près de la Camargue. Un de nos voisins de ponton, très écolo, nous explique qu'il faut bien nourrir les hirondelles et les poissons. Je lui fais remarquer qu'on pourrait aussi les nourrir avec des croquettes!!! Il apprécie très moyennement. Seule solution pour survivre: s'enfermer dans le carré et fermer toutes les ouvertures… Avec 30°, sympa….

     Un des seuls avantages, c'est que l'Inter marché n'est pas trop loin. Ça permet de faire les courses en Caddy, à quai s'il vous plaît… Venant du canal, ou la marche à pieds était de rigueur, je ne vais pas me priver.

     Un truc plutôt marrant également concerne le programme de navigation pour sortir sur le golfe de Fos. Les alluvions du Rhône ont dessiné un large banc de sable qui ferme partiellement les Golfe de Fos, le rendant extrêmement  dangereux par mistral. C'est même complètement casse gueule. Il y a de nombreux pépins tous les ans.

     Ce banc se nomme: "Banc de la Gracieuse"… Faut le faire!!! Faut d'autant plus le faire, que nous aurons quitté l'atlantique en Gironde par le "banc de la mauvaise" !!!

     L'un comme l'autre nous auront été très généreux: beau temps, vent maniable, météo clémente. Ça va…

Du lundi 21 au vendredi 25 mai      St Louis au sec

                Mise au sec, matage, carénage,  finalisation des bandes décoratives, vidange et … regarnir  le presse étoupe.  Pour les premières parties du programme, pas de problème, quoique le ponçage de la coque est loin de valoir ce que Gaby sait faire… mais enfin, j'aurai le temps de fignoler l'hiver prochain en Crête. Pour le presse étoupe, c'est une autre paire de manche.  Gaby m'avait clairement expliqué à Piriac. Mais comme d'habitude, quand je ne sais pas faire, ou que je n'ai pas vu faire, j'en fait une montagne.

                En fait j'avais retardé l'échéance, et ça aurait été bien plus facile à Piriac au sec entre deux marrées, avec la sécurité de se mettre au sec si l'opération avait échoué. J'ai donc géré mon maigre tampon de tresse en place sur le canal… et à l'arrivé, j'avais plus de marge: à fond…

                Donc:

    • Vérifier que la tresse en stock est au bon diamètre, celui de l'arbre.

    • Entourer l'arbre de 4 tours de tresse pour préparer les anneaux

    • Les découper soigneusement au cutter

    • Desserrer le pressoir du porte étoupe

    • Dégarnir la tresse restante

    • Vérifier que l'arbre est en bon état

    • Regarnir le porte étoupe en faisant glisser les anneaux croisés sur l'arbre

    • Resserrer le pressoir jusqu'à ce que l'arbre, au point mort, puisse tourner à la main

     Et bien sur prier les dieux pour que tout cela marche bien à la mise à l'eau, car ici il n'y a pas de marrée pour se mettre au sec…

     Donc j'en faisais une montagne, et je m'y colle… Facile!!! Tellement facile que ça m'a mis un doute… pas possible, c'est bien trop facile, j'ai du merder quelque chose. La mise à l'eau, et le premier contrôle seront un moment délicat. J'imaginais les "gloup… gloup" des gros bouillons de flotte entrant par l'étambot!!!  Ça ce sera pour le vendredi suivant.

     En attendant, il faut gérer le quotidien. Nous sommes sur le port à sec de St Louis du Rhône, il y a des centaines de bateaux au sec. On trouve de tout, des délires en tout genre: architectes amateurs et amateurs éclairés, écolos post soixante huitard à la dérive, rêves de tour du monde à l'échouage dans cette friche industrielle,  bateaux étrangers en hivernage couverts de poussière, mecs en cavale à bout de souffle.  Le tout dans l'ambiance très particulière d'un lieu coupé du monde entre Rhône, Méditerranée, golfe de Fos, et canal St Louis. C'est un île. Mais une île ou mieux vaut ne pas rester. On peut y pourrir très vite. D'ailleurs tout est pourri dans cet environnement industriel rouillé et abandonné. Vraiment à donner la chair de poule. C'est aussi le port le moins cher de toute la côte. Ceci expliquant peut être cela.

     On y trouve aussi des gens comme nous qui préparent leur bateau avant la mise à l'eau. Je reconstitue vite fait une petite ambiance "ponton B"  avec nos voisins. Il y a un breton qui a racheté un Folie douce pas cher… pour son fils. Il a démonté le safran, et pour le sortir de la jaumière, a dû creuser un trou de 50 cm au sol!!! Et qui se trouve bien emmerdé pour le remonter. "Vous qui êtes un bon marin"  me dit il, pouvez vous me conseiller… heu… Bien sympa quand même, il me prêtera la perceuse et les mèches pour finir d'assembler la fameuse passerelle de Sylphe.

                Rencontré également un père et son fils qui carènent leur Sun fizz. Le monde est petit. C'est un surfeur Internet passionné, en particulier du forum Sail on the world, site ou j'ai foutu une merde pas possible l'année dernière quand je m'emmerdais en Aveyron. Il se souvient très bien. Marrant … non???

Nous les retrouverons quelques jours plus tard au mouillage dans les calanques de Marseille.

                Il y a aussi Hermann, qui officie dans ce qui tient lieu de taverne. Hermann a de l'ordre et de la méthode. Faut pas contrarier Hermann. C'est saucisse ou steack haché avec des frittes. C'est Hermann qui décide ce que l'on va manger. Hermann n'aime pas les moustiques et les arabes. Pour les arabes, Hermann sait comment les éradiquer. Comme je lui faisais remarquer gentiment que ma grand mère était arabe… Heu… dit Hermann, se posant des questions sur mon goût pour ses saucisses. Hermann a poussé une grosse colère quand j'ai voulu laisser mes pinceaux et mes pots de peinture vides dans les poubelles situées à une dizaine de mètres de son hostellerie: ce sont des poubelles pour les ordures ménagères m'a dit Hermann, en me traînant jusqu'au pieds des poubelles pour me montrer un règlement pourri et illisible. Les Français n'ont pas d'ordre a conclu Hermann. Quand je lui ai demandé ou déposer mes déchets, Hermann a dit: emportez les chez vous… Après lui avoir dit que je n'avais pas de maison, j'ai vu un grand moment de fatigue s'abattre sur Hermann. Les Bretons sont encore plus pénibles que les moustiques. Ceci dit, Hermann est fermé le mercredi. Hermann doit avoir des enfants, "No body is perfect…"

     
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